lundi 17 novembre 2014

La Chose Enhaurme à la Saint-Vé

CP ! CP !
Châssis à... molettes ! (bis)
Henri, Volt, Ampère ! (bis)
Subito... Crash ! (bis)
Qu'est-ce que le CP ?
C'est une chose énhaurme !


Qui ne connaît pas le cri du Cercle Polytechnique, gueulé à pleins boulons ? L'anecdote veut qu'il soit né d'un voyage du Cercle en Yougoslavie, en 1927 (Cercle Polytechnique 1884-2009. 125 années à l'ULB vécues par le CP). Ou en Italie dans les années 1930...

C'est peut-être en clin d'œil à son cri que le C.P. réalisa une Chose énhaurme - un monstre à bosse - à l'occasion de la Saint-Verhaegen. A moins que ce ne soit le cri qui fasse allusion aux bestioles créées pour les festivités du 20 novembre.

Première trace

On rencontre déjà la "Chose" lors de la Saint-Vé de 1931. Il est possible qu'il s'agisse là de sa première apparition. Mais rien ne permet, pour le moment, de l'affirmer avec certitude.

La bébête est, en tout cas, alors composée de sphères (en tissu), qui lui donnent un air de monstre marin digne de Jules Verne.


Photo extraite du Soir Illustré du 28 novembre 1931.
Image empruntée au site Quevivelaguindaille.be

Une seconde apparition

On revoit la Bête du C.P. sous une nouvelle forme à la Saint-Vé de 1933-1934, en compagnie du futur résistant Jean Guillissen. Et on peut dire que le monstre de Polytech est doté d'attributs imposants et qu'il "pète des flammes".

Après cette date, on perd la trace de la Chose Enhaurme.


Ce document provientdu Service Archives, Patrimoine et Collections spéciales de l'ULB.
50 avenue Franklin Roosevelt à 1050 Bruxelles.


Le monstre et ses attributs... monstrueux.

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Les attributs du monstre, bien visibles.

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Avec Jean Guillissen.

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Une mode ?

Le C.P. n'était pas le seul à donner naissance à des créatures étranges. Lors de la Saint-Vé 1933-1934, les étudiants de Gembloux étaient venus, eux, avec une vache...




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dimanche 16 novembre 2014

Le premier char de Saint-Vé en 1924 ?

La plus ancienne photographie de char de Saint-Verhaegen que nous connaissions est conservée aux Archives de l'ULB. Le recto de la photo mentionne l'année 1924. Néanmoins les Poils arborent des pennes munies d'un blason facultaire. Or l'introduction de ce dernier n'est décidé que lors de la codification de la penne en 1926. La photo serait donc postérieure à 1926...

Le char n'est autre qu'un corbillard, décoré d'un "Feu le droit international... R.I.P." Des Poils en pleurs, larme à l'œil et mouchoir à la main, suivent le sapin. Aucun corbillard n'est mentionné dans les chroniques de Saint-Verhaegen pour les années de 1926, 1927 et 1928... La date de ce cliché reste donc inconnue. 

Le décor du char fait peut-être allusion à la conférence de Londres, tenue pendant l'été 1924 mais sans certitude. Le Premier ministre britannique Ramsay Mac Donald y obtient le retrait des Français de la Rhuhr et leur acceptation du plan Dawes sur les réparations financières allemandes des dégâts provoqués par la Première Guerre mondiale.

Nous n'avons pas encore retrouvé la chronique de la Saint-Vé du "Bruxelles Universitaire", organe de l'Association générale, qui éclairerait sans doute ce cliché. 

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50 avenue Franklin Roosevelt à 1050 Bruxelles
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Cliquez sur la photo pour l'agrandir.

samedi 15 novembre 2014

Les plus anciennes photos de Saint-Vé ?

Voici les plus anciens clichés de Saint-Verhaegen que nous ayons retrouvés aux Archives de l'ULB. D'autres se trouvent peut-être encore dans l'un ou l'autre fonds.

Ces vues ne sont malheureusement pas datées. Si l'on en juge par la qualité du papier et si on la compare à d'autres documents de l'époque, soit elles ont été prises lors de la Saint-Vé de 1909 - où les 75 ans de l'ULB furent célébrés avec faste -, soit elles sont légèrement antérieures à cette date.

A cette époque, le cortège ne compte pas encore de char. Les étudiants défilent à pieds avec les drapeaux des Cercles.

Et les discours se font au pied de la statue de Verhaegen, dans la cour des bâtiments de la rue des Sols.

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Le cortège et ses drapeaux.
Les étudiants semblent alignés par rangs mais c'est sans doute un effet d'optique.
La police ouvre la route.

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Pennes, bérets et chapeaux boules se côtoient.

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Le cortège et les drapeaux des Cercles.

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Discours dans la cour des bâtiments de l'Université, rue des Sols.
Les Cercles sont réunis - avec leurs drapeaux - au pied de la statue de Verhaegen.

samedi 19 juillet 2014

1938-1939 : le C.P. voyage, parraine et baptise

Du baptême au voyage en Suisse, des visites des aciéries de Charleroi à la construction du géant Zéphyrin, le Cercle Polytechnique livre dans le Bruxelles Universitaire du 20 novembre 1938 une présentation impressionnante des activités du premier semestre académique.

Quelques notes sur le baptême

On relèvera que c'est cette année-là que le "parrainage" des Bleus fait son apparition au C.P.

Le baptême des "unistellaires" (comme appelait aussi les Bleus) se déroulait alors dans des cafés, en l'occurrence "Le Cornet", en présence de Poils en uniforme militaire s'ils effectuaient leur service.

Les joyeusetés baptismales se terminaient encore à cette époque par la dégustation d'un punch et (ce qui nous semble heureusement inconcevable aujourd'hui) par une visite des lupanars.

Les festivités s'achevaient assez tôt avant-guerre. Le baptême 1938 du C.P. s'est, par exemple, déroulé le 28 octobre et s'est clôturé le 4 novembre par la remise des "diplômes" aux Bleus, cérémonie qui a traversé le temps.






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50 avenue Franklin Roosevelt à 1050 Bruxelles.

lundi 14 juillet 2014

Du haut de ces bieramides... Zéphyrin vous contemple

« Je jure de défendre partout et toujours le Libre Examen ainsi que l'éclat et le renom de la Chose Enhaurme. Qu'ainsi m'aident l'Ordre et Zéphyrin. » Tel est le serment que, depuis 1965, des polytechniciens prêtent lorsqu’ils sont décorés de l’Enhaurme Ordre de la Grand Molette pour leur dévouement à leur cercle facultaire. (in 125 années à l'ULB, vécues par le CP. Cercle Polytechnique 1884-2009).

Quiconque a croisé le Cercle Polytechnique en vadrouille connaît l’équation répétée en chœur « Qu’est-ce que le C.P. ? C’est une Chose Enhaurme ! ». Et peut donc traduire le serment. Mais reste une énigme : Zéphyrin…

Du plus petit Poil du C.P....

Bruxelles Universitaire, journal de l’Association générale, le mentionne déjà en novembre 1925, dans la chronique d’une expédition du C.P. Le billet indique en entame - et sans autre précision - que trois pennes noires « escortant Zéphirin » se sont rendues au baptême de Mons. Il se conclut, aussi laconiquement, sur le retour en train, pendant lequel « Zéphirin allait, par étapes, exhiber sa bonne gueule. »

Le chant final de la Revue « C.P…. rimé ! », donnée en 1930, l’évoque également, au détour d’un vers : « Faut rien définir quand on écrit / CP, CP, encore CP. / Zéphyrin comprend et, joyeux, s’agite. »

De ces quelques mots, on déduit que Zéphyrin doit être une figurine, une marotte. Ce que confirme le dessin du livret de la revue « Les Profs en chaire et en noce » jouée en 1932.


Ce qui confirment aussi une photographie du char du C.P. de la Saint-Vé 1928 ainsi qu'une autre du C.P. de 1936, conservée aux Archives de l’ULB…. Sur les deux documents, un Poil tient le drapeau du Cercle, avec la tête de Zéphirin en bout de hampe.



Ce document provient du Service des Archives de l'ULB.
Le recto de la photo porte les dates 1934-1935.
Mais il s'agit bien du char présenté lors de la
Saint-Verhaegen 1928.

A gauche de la locomotive, un Poil tient en main le drapeau du C.P.
dont la hampe se termine par la tête de Zéphirin.

Pour agrandir l'image, cliquez dessus.
Photo de la promo 1936 des Ingénieurs de l'ULB.
Ce document provient
du Service Archives, Patrimoine et Collections spéciales de l'ULB.

50 avenue Franklin Roosevelt à 1050 Bruxelles.


Zoom avant de la pupille. Zéphyrin est là, à la pointe de la hampe du drapeau : c’est une tête d’une dizaine de centimètres, coiffée d’une penne noire à longue visière ; le cou est orné d’un nœud papillon tricolore (sans doute aux couleurs nationales).

Le nez - énhaurme - toujours dans les nues, le plus petit Poil du C.P. doit sans doute son doux nom au zéphyr, ce vent d'Ouest qui fait claquer le drapeau du Cercle.



Ce nom aérien lui convient d’autant mieux qu’il incarne le souffle et l’âme du Cercle, selon la mythologie tracée dans « Profs et scies » en 1934. Dans cette revue, un prof implore-t-il « Esprit du C.P. / Descends sur nous ! » qu’aussitôt Zéphyrin (un mannequin) apparaît dans le tonnerre et les éclairs. Les profs se disputent alors son éducation. Les Poils s’en mêlent. Chacun se saisit de Zéphyrin, qui finit par se déchirer. Les Poils emportent bien entendu la tête (pleine de Science) et la fixent sur la hampe du drapeau du Cercle.

... Au plus grand Poil du CP...

En novembre 1937, à l’occasion du cortège de la Saint-Verhaegen, le C.P. enfante cette fois un géant dans ses ateliers de la rue de Linthout (près du Cinquantenaire). Il le baptise aussi Zéphyrin. La parenté avec le zéphyr, qui fouette le pif du colosse, n’en est que plus évidente.
Ce premier géant - en route pour la Saint-Vé - est malheureusement décapité par les branches des arbres de l’avenue des Arts (qui longe le parc de Bruxelles).

Zéphirin à la Saint-Verhaegen 1937, avant sa décapitation.

Ce document provient du Service des Archives de l'ULB.

En novembre 1938, le Cercle polytechnique (une vraie maternité) met au monde un monstre de… 5 mètres de hauteur. Ce Zéphyrin est assis sur un tonneau de forte taille. Il peut pivoter sur son siège. Ses jambes et ses bras sont articulés, pour mieux bénir et « purifier les manchabals » (autrement dit, décoincer les bloqueurs invétérés).Le C.P. - pris de folie des grandeurs - le dote à cet effet d’un « Turbo Démanchabaliseur ». Cette mécanique infernale est certainement inspirée de la « machine pour ladémanchabalisation » de Francis André, dont les plans avaient été publiés en 1928 et en 1933 à la Une du Bruxelles Universitaire.La machine d’André fonctionnait en trois temps. Un bras mécanique défonçait d'abord le chapeau boule du manchabal à coups de poing. Puis quatre Poils gavaient le « patient » de bière Amstel avant de lui injecter sa tisane en clystère à l’aide d’un gigantesque clysopompe. Quant au redoutable engin du C.P., les Poils y introduisent l’étudiant bloqueur (un mannequin à chapeau « buse ») par le toit. Après broyage et laminage, activation de roues crénelées et d'une courroie de transmission, le miracle s’accomplit : le « Turbo Démanchabaliseur » produit un Poil hirsute muni d'une chope.

Un monstre de 5 mètres de haut
1. Construction de la structure du "Turbo Démanchabaliseur", rue de Linthout.

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Saint-Vé 1938.
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 2. Le toit du "Turbo Démanchabaliseur" et l'entrée du manchabal.

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3. Sur le flanc gauche du "Turbo Démanchabaliseur", on voit les roues crénelées. Et à l'arrière, la sortie de la machine. Au-dessus de celle-ci, on lit "... thermique. Visite guidée. 1 franc pour les enfants."

A l'arrière-plan, on reconnaît le tonneau et la structure métallique de Zéphyrin.

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Détail de l'image originale.
Saint-Vé 1938.
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4. La structure articulée de Zéphyrin et sa tête en papier mâché, coiffée d'une penne.


5. Zéphyrin est couvert de tissus.

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Saint-Vé 1938.
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6. Le flanc droit du "Turbo Démanchabaliseur".

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7. Zéphyrin et sa machine infernale sortent des ateliers du C.P., rue de Linthout.

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8. Zéphyrin au Sablon.

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Saint-Vé 1938.
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9. Zéphyrin, au Sablon, se promène en costume et cravate nouée en lavallière.

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10. Le flanc droit du "Turbo Démanchabaliseur" avec le thermomètre et la courroie de transmission.

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11. L'insertion du manchabal dans la machine.

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12. Au Grand Sablon, Zéphyrin pivote sur lui-même, bénit et purifie les manchabals de ses bras (et de ses jambes) articulés.

Notons au passage qu'à cette époque des maisons sont encore présentes sur la place, juste en-dessous de l'église Notre-Dame.

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Saint-Vé 1938.
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Faire-part dans le B.U.


L’extravagance du Cercle Polytechnique ne s’arrête pas en si bon chemin. Comme le relate le B.U., le 19 novembre 1938, le C.P. confie le colosse à l'Association générale au cours d’une imposante cérémonie et des centaines de Poils assistent alors sur la Grand-Place au « plus immense des baptêmes », celui de Zéphyrin. C’est la « plus belle des consécrations, l’entrée officielle du bon géant (…) dans notre vie estudiantine ».

 

Sous le titre "Zéphyrin a un an", Bruxelles Universitaire du 20 novembre 1938 raconte en détail la naissance du bon géant.







Une médaille

Sur la médaille de Saint-Vé frappée en 1938 par l'Association générale des étudiants de Bruxelles figure un Poil dont la penne noire (de Polytech, donc), les traits - et le pif - ainsi que la lavallière nous font immanquablement penser à ceux du géant Zéphyrin. Et ce, d'autant plus que ce Poil est "photographié" en contre-plongée (comme vu d'"en bas"), ce qui souligne sa hauteur.

Est-ce bien le colosse du CP qui est représenté sur ce bout de métal de 1938 ? C'est tout à fait possible... D'une part, Zéphyrin existe alors depuis un an. Et, d'autre part, il revient, cette année-là, accompagné d'une machine à démanchabaliser, se fait adopter par l'Association générale et se fait baptiser sur la Grand-Place devant des centaines de Poils.

De telles cérémonies avaient d'ailleurs probablement été organisées longtemps à l'avance, ce qui laissait le temps à l'AG de tirer des médailles de Saint-Vé - les premières du genre - en l'honneur de l'énhaurme Poil.

Les couleurs rouge et verte, présentes sur la médaille,
rappellent celles de Bruxelles
portées jusqu'en 1926 sur les rubans bicolores des pennes et bérets
des étudiants de l'ULB.

Après la Seconde Guerre mondiale...

En l'état actuel de nos recherches, on ne sait pas ce qu'il advint du géant. Bruxelles Universitaire du 20 novembre 1938 indique qu’il « sortira chaque année à pareille époque » et que, « tel un gardien tutélaire, il surveillera et dirigera du haut de ses 5 mètres, les évolutions désordonnées de ses minuscules condisciples (…) » Les chroniques de la Saint-Vé n'ont cependant pas conservé sa trace après cette date.

Si le titan n’a - semble-t-il - pas survécu à la Seconde Guerre mondiale, le petit Zéphirin a - lui - traversé le conflit sans trop de difficultés. On le retrouve, accompagné du même drapeau, sur une photo du C.P., qui doit dater de la fin des années 1940 ou début des années 1950. Et c’est encore sa caricature, dessinée dans les années 1930 par le génial Bizuth, qui figure sur la couverture de la partition de la « Marche du C.P. » éditée en 1959.

Photo transmise par B.n..t Bacchus Poncin, sans date.

Le nez de Zéphyrin a manifestement été modifié depuis 1936.


On reconnaît la penne de Polytech, le nez et le nœud pap' tricolore de Zephyrin.
Image empruntée à Quevivelaguindaille.be

Néanmoins, tout comme son énhaurme frère, le plus petit Poil du C.P. a, lui aussi, disparu aujourd’hui. Les signataires offrent 18,34 bouteilles de lambic à l’Ancienne ou l’Ancien qui pourra les renseigner à ce sujet.

D’ici là, souhaitons que le C.P. insuffle à nouveau l’esprit de Zéphyrin dans un corps de 5 mètres de haut, histoire de « purifier les manchabals ».

Dans le bronze d'une pierre tombale

Grâce aux recherches menées de longue haleine par Bram Desmet, la tombe de Frans Kufferath a pu être retrouvée.

Le Kuff, ainsi que ces amis le surnommaient, début des études d'ingénieur des Mines en 1931. Il a été questeur du C.P. en 1933-1934 et 1935-1936. Il préside également l'Association générale des étudiants en 1934-1935, année du Centenaire de l'ULB et en est vice-président en 1935-1936. Avec les Amis de la Chanson estudiantine, qu'il cofonde et préside, il édite les Fleurs du Mâle de 1935 et 1938.

Appelé sous les drapeaux en juin et en août 1939 au vu de la situation internationale, il passe sous-lieutenant en novembre 1939. Il commande une section d'artillerie qu'il commande à Herderen, à mi-chemin entre Tongres et Maastricht, qui doit appuyer les positions défensives sur le canal Albert ainsi que le Fort d'Eben-Emael. Il tombe à l'aube du 11 mai 1940.

La stèle en bronze de sa tombe a été réalisée d'après une photographie. Celle-ci date sans doute de 1934 au vu des étoiles sur la penne de Kufferath. Elle le présente en compagnie de Zéphirin. La sépulture se trouve au Cimetière des Bruxelles, dans la 7e avenue, près du rond-point des Allemands.

De 1945 au milieu des années 1950, un hommage était rendu à cet Ancien et à travers lui à tous les étudiants tombés pendant la guerre. La Société du Grand Clysopompe a relancé cet hommage lors de la Saint-Verhaegen 2016.
 
 



  
 
Olivier Hertmans
Touffe Decostre

dimanche 29 juin 2014

Elégie pour une capote anglaise

C'est en 1935 qu'"Elégie" et "La capote anglaise", deux chansons typiquement estudiantines, sont imprimées pour la première fois dans les Fleurs du Mâle.

Dans ces textes, un Poil en "crapuleuse" (terme qui désignait alors la penne) et un Bleu sont victimes de leurs amours et subissent les assauts de la vérole et de la chaude pisse.

Dans les années 1930, les maladies vénériennes étaient chose courante. Aussi n'est-il pas surprenant que "La capote anglaise" ait - sous ses traits d'humour - des accents d'éducation prophylactique.

Sur les deux textes planent d'ailleurs l'ombre du médecin. L'un mentionne des injections. Et l'autre un injecteur. Cet instrument (encore très employé en 1930) n'appartient pas qu'à la sphère médicale. Il fait également partie du monde étudiant depuis les années 1850 : les Poils s'en sont servi pour verser à boire et effrayer les Bleus lors de leur baptême.

Un même air

Ses chansons jumelles ont été conçues à la même époque (ce qui semble assez cohérent sur le plan biologique) et ont été composées sur le même air, celui de "La Paimpolaise". La mélancolie et les accélérations - pour ne pas dire le roulis - de cette chanson de marin signée par Théodore Botrel en 1895 mettent en relief l'ironie des deux textes estudiantins.

En raison de leur rythme, les quatre premiers vers peuvent être entonnés par un seul chanteur et les suivants par l'ensemble de l'assemblée.

Le Poil en crapuleuse et son injecteur.
Illustration d'"Elégie", par Ram, dans Les Fleurs du Mâle de 1935.


Elégie (1935)
Air : « La Paimpolaise » (Théodore Botrel)

Quand une vérole astucieuse
Emporta la vieille Lison,
Son type, un Poil en crapuleuse,
Alla la voir à sa maison.
Et le pauvre gars
Murmurait tout bas :
Ma pauvre cocotte adorée,
Nous n’irons plus aux bois jolis
Cueillir, jusques à la soirée,
De tout petits myosotis.

En souvenir de son aimée,
Il découpa sous le nombril
Une boucle bien parfumée
Qu’il lia-z-au moyen d’un fil.
Et le pauvre gars
Murmurait tout bas :
Je vais me faire un scapulaire.
Ô ma chère, avec tes poils noirs,
Pour fêter ton anniversaire,
Tous les ans dans la paix du soir.


Puis, pour recueillir l’héritage,
Il emporta, les yeux en pleurs,
Dernier meuble d’un beau ménage,
Un mélancolique injecteur.
Et le pauvre gars,
Murmurait tout bas :
Tu m’as fait tant crédit, ma chère,
Pour le loyer de ton doux cœur,
Et de plus, cadeau de misère,
Tu me laisses ton injecteur.

Ell’ lui laissait une autre chose !
L’étudi-ant s’en aperçut,
Et devant cette apothéose,
Il en resta vagu’ment déçu.
Et le pauvre gars,
Murmurait tout bas :
Putain, au Diable ta charogne
Tu m’as foutu, ça je le crois,
Une vérole qui me rogne,
Et ne peut venir que de toi.



Lettrine de "La capote anglaise", par Jean Dratz, dans Les Fleurs du Mâle de 1948.

Illustration de "La capote anglaise", par Jean Dratz, dans Les Fleurs du Mâle de 1948.


La Capote anglaise (1935)
Air : « La Paimpolaise » (Théodore Botrel)


Dans la chambrett’ d’un’ petit’ femme
Un Bleu allait perdr’ sa vertu.
Sur le point d’assouvir sa flamme
De sa famille, il s’est souv’nu.
Quand il est parti
Son vieux pèr’ lui dit :
« Mon cher fils, chaqu’ fois que tu ba*ses,
C’ qui arrive, étant étudiant,
Munis-toi d’un’ capote anglaise,
Ca t’évit’ra des accidents. »

Suivant les conseils de son père,
Le Bleu mit un préservatif,
Mais la bell’ ne l’ laissant pas faire,
Les seins gonflés, les yeux lascifs,
Tendrement lui dit :
« N’en mets pas, chéri.
Ne mets pas de capote anglaise,
Dans mon c*n, fourr’ ton v*t tout nu,
C’est bien meilleur, lorsque l’on ba*se
De sentir couler le bon jus. »
 

Ecoutant c’ que lui dit la belle,
Le Bleu l’étendit sur le lit,
Et se couchant tout nu sur elle,
Dans son p’tit trou, il mit son v*t.
Le Bleu déchargeant
Dit en jou-iss*nt :
« Au diable, la capote anglaise
Et tous les conseils de papa,
C’est bien meilleur lorsque l’on ba*se
Enlacé dans d’aussi beaux bras. »

Parlé : Catastrophe !

Huit jours après cette aventure,
Le pauvre Bleu dans l’urinoir,
Sentit soudain une brûlure,
L’ malheureux pissait des rasoirs.
Contemplant son v*t,
Tristement, il dit :
« Que n’ai-j’ mis de capote anglaise,
Suivi les conseils de papa.
On n’a pas si bon quand on ba*se
Mais d’ chaud’ piss’, je n’en aurais pas. »


Parlé : Moralité :

Quand on emploie l’ permanganate
Ou qu’on se fich’ des injections,
On peut s’enflammer la prostate
Ou bien se fich’ un gros couillon.
Donc mes bons amis,
Ecoutez ceci :
Pour êtr’ sûr, chaqu’ fois que l’on ba*se
Qu’ huit jours après ça n’ coul’ra pas,
Mettez une capote anglaise.

Suivez les conseils de papa.

Illustration de "La capote anglaise", par Jean Dratz, dans les Fleurs du Mâle de 1960.