vendredi 27 novembre 2020

Des médailles de Saint-Verhaegen, par Clarence

Qui dit Saint-Verhaegen dit médailles. Et depuis 1982, Francis Clarembaux, alias Clarence, en a fait frapper un très grand nombre à l'occasion des festivités du 20 novembre.

S'il fallait les présenter en quelques mots, nous pourrions dire que ses médailles se distinguent des autres par trois traits.

Tout d'abord, si depuis les années 1970 l'actualité chaude (ou tiède) est évoquée par les médailles de l'Association des cercles facultaires et de l'Association des cercles étudiants, c'est par contre l'éternel Etudiant et son biotope qui sont principalement convoqués dans celles émises par Clarence (qui perpétue en cela la tradition des médailles officielles de 1938 à 1970).

Ensuite, les médailles frappées par Clarence se reconnaissent par leur taille (souvent grande), leur forme (souvent inhabituelle) et par le nombre de variations de couleurs (qui rappellent parfois celles d'un Cercle facultaire, d'un Ordre ou d'une Corporation).

Enfin, les médailles de Francis Clarembaux comportent de nombreuses allusions aux Ordres secrets, aux Corporations et à la Franc-Maçonnerie (dont l'une des loges - les Amis Philanthropes - participa activement à la naissance de l'Université libre de Bruxelles).

Il serait difficile de présenter en un seul articulet l'ensemble des insignes de Saint-Vé réalisés par Clarence. Nous avons choisi - arbitrairement - de n'en montrer que deux séries. Ainsi que cinq autres pièces qui se démarquent. Vous trouverez de nombreuses autres créations de Clarence sur le site Collectionnes Studenticae.

Gageons que ces quelques médailles donneront des idées amusantes aux Poils et Plumes pour ponctuer de couleurs vives les prochaines Saint-Vé ! L'avenir est à nous, morbleu ! L'avenir est à nous !

Un tout grand merci à J.n. V.n d. V.l pour les photos de sa collection.

Une provocation dans la chope

"Dieu existe !" Cette affirmation a priori provocatrice, dans une Université où nombre d'étudiants se revendiquent athées, permet de taquiner quelques monstres sacrés typiquement ULBistes. Les différents Ordres y sont représentés. Il ne manque que celui des Truands (fondés en 1951).

Cette série, dessinée par Serge Gisquière, a été frappée en 1985 chez Chaubet, à Saint-Gilles. Les médailles ont la forme d'une chope à anse, coiffée de sa mousse. Elles font 4 cm de large sur 5 cm de haut.

Collection de J.n V.n d. V.l
A la gauche de Dieu figurent l'équerre et le compas des francs-maçons,
ce qui laisse penser qu'il s'agit en réalité du Grand Architecte de l'Univers.

Collection de J.n V.n d. V.l
Dieu ressuscité sous les traits d'un Frère
de l'Ordre des Macchabées (fondé en 1918).

Collection de J.n V.n d. V.l
Dieu serait le Senior de la Corporatio Bruxellensis (fondée en 1968),
Il est représenté par le Zirkel de celle-ci.
La médaille est aux couleurs de la Corporation.

Collection de J.n V.n d. V.l
Dieu serait-il un Frère de l'Ordre du Phallus (fondé en 1969) ?
"Il est des nôtres", proclame en tous les cas l'étudiant,
qui remplace un "ô" par un phi (symbole du Phallus).

Collection de J.n V.n d. V.l
Dieu serait ici un Frère de l'Ordre des "Dindons" (fondé en 1979).
La légende précise qu'il serait le dindon de la farce
comme Super H.H., qui n'est autre que le Recteur Hervé Hasquin.

Collection de J.n V.n d. V.l
Dieu serait un Frère de l'Ordre des Chauve-Souris (fondé en 1981).
Notons le joli jeu de mot.

Collection de J.n V.n d. V.l
Autre sympathique "provocation" de Clarence :
Dieu serait un Camarade calotté
de l'Ordre studentyssime, venesrable et très magnifique
de François Villon de Montcorbier (fondé en 1948),
A moins que Dieu ne soit Villon lui-même,
représenté par le monogramme de l'Ordre ?

Il faut sans doute également lire un calembour :
en 1985, au Cimetière d'Ixelles, existait le "Villon",
un bistrot de guindaille, au nom du poète truand et étudiant.

Collection de J.n V.n d. V.l


Tout un fromage pour l'ULB

Cette série, dessinée cinq ans plus tard par Gérard Collard, parle d'elle-même. Toute la famille de l'Alma Mater y représentée. Ces... six quarts de cercle sont de 3 cm de côté.


Collection de J.n V.n d. V.l

Collection de J.n V.n d. V.l

Collection de J.n V.n d. V.l

Collection de J.n V.n d. V.l

Collection de J.n V.n d. V.l
Cette médaille se démarque des autres par les couleurs
de la Corporatio Bruxellensis, versées avec une négligence feinte.
Cet austère franc-maçon a la bouche en équerre et le nez en forme de compas. 

Collection de J.n V.n d. V.l


Des découpes hors normes

En 1998, cette bouteille (ici aux couleurs - bleu et rouge - de la Corporatio Bruxellensis) est en réalité la version découpée d'une médaille plus grande.


Collection de J.n V.n d. V.l
Dans une des variantes, le visage de l'étudiant est au naturel
et la penne est blanche à visière noire.

Collection de J.n V.n d. V.l


Clarence a utilisé le même procédé de découpe dans d'autres médailles.

Ainsi la "Crucifiée", dessinée en 1993 par Isabelle de Ruysscher, existe en deux versions : l'une en forme de cercueil et l'autre - extraite de la première - en forme de croix.

Collectiones Studenticae et photo de Klaas Chielens.
La médaille existe dans différentes couleurs.
On retrouve ici le Zirkel de la Corporatio Bruxellensis,
le point d'exclamation propres aux corporations
le 13 des Frères Macchabées, des initiales propres à l'Ordre du Phallus
ainsi que l'équerre et le compas des francs-maçons.
Il existe également une version avec un Poil de l'ULB,
dont la penne porte un phi de l'Ordre du Phallus.


La médaille suivante, éditée pour les 30 ans de la Corporatio Bruxellensis, comporte également deux versions. La première est composée de l'étudiant et du fond bleu. La seconde - découpe de la précédente - n'est composée que de l'étudiant.

On notera par ailleurs que cette médaille est la première où apparaît un band, ce ruban porté par les Corporations et les Gildes étudiantes.

Touche d'humour : ce commilito de la Corporatio Bruxellensis met triomphalement le pied sur un tonneau marqué du Zirkel de la Corporatio Brabantia Bruxellensis, société rivale.

Photo de Francis Clarembaux.
Les dates sont données en années maçonniques :
il faut bien entendu lire"1967-1997".
Le zéro du 30 est remplacé par un phi de l'Ordre du Phallus.

Collectiones Studenticae. Photo de Klaas Chielens.


Des médailles (trois petits points)

Cette médaille a été frappée en 1988 (chez Chaubet) à l'occasion du centenaire du cortège de Saint-Verhaegen. C'est à ce centenaire que fait référence la mention "un siècle d'Art royal" (art de l'architecture, cher aux francs-maçons).

La médaille a une forme d'équerre, l'un des symboles de la Franc-Maçonnerie. Quant à l'éléphant, dont la présence peut sembler a priori incongrue, il est le symbole de la loge maçonnique des Amis Philanthropes, qui fut l'un des moteurs de la fondation de l'ULB. Enfin le chiffre 33 rappelle le nombre de degrés du rite écossais ancien et accepté pratiqué par certains maçons.

On retrouve le point d'exclamation qui achève l'expression Vivat Crescat Floreat !, propre aux corporations étudiantes. 

Serge Gisquière, en étirant la longue trompe du pachyderme et la longue visière de la penne, exploite avec humour la forme et l'espace intérieur de cette d'équerre de 5 cm de côté.


Collection En Bordeaux et Bleu.

Cette dernière médaille, en escalier (de 5 cm de large et de haut), dessinée par Gisquière en 1989, ironise sur les magouilles que l'on prête aux Ordres estudiantins ainsi qu'aux loges maçonniques.

Sur les différentes marches, on retrouve d'ailleurs le phi de l'Ordre du Phallus, le 13 des Macchabées et le point d'exclamation spécifique aux Corporations. A quoi il faut ajouter l'équerre et le compas des francs-maçons, le symbole du Royal Arch (un grade maçonnique), le 33 (du rite écossais ancien et accepté, évoqué plus haut) et enfin la croix du Chevalier bienfaisant de la Cité sainte (un autre grade maçonnique). On s'étonnera d'ailleurs de trouver autant de symboliques maçonniques sur une médaille destinée à des Poils et Plumes.

Mais, au fait, de quelles magouilles est-il question quand on sait que les étudiants passent en réalité leur temps à guindailler et à siffler des bières ?

Collection En Bordeaux et Bleu.

mercredi 18 novembre 2020

69 ans : un disque, des Fleurs et une médaille truandesques

A l'occasion des 69 ans de la Truandaille, une archive sonore du milieu des années 1960 a été exhumée. Elle a été mise en ligne pour le plaisir de vos esgourdes : il suffit de suivre les liens et de remonter le temps en suivant ce fil d'Ariane. Un disque a donc été ramené à la vie... Mais une médaille de Saint-Verhaegen a aussi été frappée par les Truands de la Coquille.

Un vinyle 

Commençons par le disque... Bien qu'ils l'aient enregistré en studio, les Truands voulaient que l'ambiance de leur 45 tours fût proche de celle d'une guindaille. L'exercice, difficile, est assez concluant.

Parmi les titres accompagnés d'un accordéon, on retrouve "La Marche des étudiants", hymne de la Truandaille. Ce chant, rédigé en 1919 par Paul Vanderborght, était à peu près tombé dans l'oubli lorsque la Confrérie le ressuscita en 1951.

Aujourd'hui, ce chant magnifique s'est diffusé au-delà d'un cercle restreint d'étudiants. Et la qualité des vers de Vanderborght (poète aujourd'hui trop oublié) lui vaut d'être entonné lors de tous les cantus des Guildes de l'Université libre de Bruxelles.

Les amateurs de chanson estudiantine remarqueront cependant que le rythme de cette "Marche des étudiants" reprise sur le vinyle est légèrement différent de celui d'aujourd'hui. C'est pourtant toujours sur le rythme old school que les Anciens de l'Ordre l'entonnent de nos jours.

On entendra également ici l'incontournable "Pendu", qu'aurait sans doute volontiers brailler le poète François Villon. On remarquera tout de suite que ce chant traditionnel est étrangement amputé de son troisième couplet.

Les microsillons ont aussi immortalisé le fameux "Hallelujah !". On répète ce dernier cinq fois en tournant les mains selon le tempo (comme des marionnettes) ; puis l'on fait semblant de tirer une ancienne chasse d'eau (comme une manette de train à vapeur) en émettant le son de la chasse.

A ces cantiques sacrés, on peut ajouter deux chansons paillardes classiques, "Trim-troum-tram" et "Le Pou et l'Araignée", ainsi qu'une troisième désormais sortie des chansonniers : "Les couilles à Stef" .




En plus d'une expression propre à la Confrérie, la pochette du disque reprend une gravure illustrant la "Ballade des Pendus", extraite du "Testament" de François Villon, publié en 1490.

Quant au titre du disque, "Folastres Chansons & Couplets de haulte Gresse Goualés par les Ribauds", il fait écho à des expressions reprises dans la préface des "Fleurs du Mâle" de 1965.

Dans cette édition du chansonnier, figurent en effet les mêmes termes - et d'autres - estampillés truands, soulignés par nous : "Vous trouverez ici colligée [...] par nos linguistes les plus éminents, la plus fine fleur des chansons escholières, truandiques, gaillardes, paillardes, ribaudes, primesautières, ordurières, de haute graisse et de bas étage, frisques et de bon aloi [...]. A tous buveurs, gueuleurs, gens de joyeuse compagnie au ris clair et à la voix tonnante, salut et pantagruélique guindaille !"

En faisant surgir du passé les voix de vieux Poils, dont certaines se sont tues, ce disque met en évidence que, de Saint-Verhaegen en Saint-Verhaegen, le fil de la guindaille et de la fraternité ne se rompt pas. Malgré les alea de l'Histoire, ces très vieilles chansons nous sont encore connues...

Le chant estudiantin est un pont jeté à travers le temps : le Bleu fraîchement tondu et l'Ancien à quadruple bedaine peuvent se rencontrer au détour d'un refrain, à la pointe d'une rime. Les "Fleurs du Mâle" sont la taverne commune, où chacun peut rire et siffler une chope : reconnaître en l'Autre une même joie de Vivre.

Pour écouter "La Marche des Etudiants" et l'"Alléluia", cliquez ci-dessous sur la photo de Face B du disque. 


Pour écouter "Le Pendu", "Les Couilles à Stef" et "Kom mo binnen", cliquez ci-dessous sur la photo de la Face A du disque.



Des Fleurs

La préface des "Fleurs" de 1965, rédigée par un Truand, reflète assez bien l'esprit dans lequel la Confrérie chantait alors les airs enregistrés sur le vinyle. Aussi la donnons-nous in extenso.

Couverture des "Fleurs du Mâle" de 1965.



Une médaille

Manifestement, les Truands de la Coquille ont également fait frapper une médaille de Saint-Verhaegen pour célébrer leur 69e anniversaire. Celle-ci peut logiquement se regarder dans les deux sens, dans un jeu de miroir, le comitard cagoulé faisant face à l'étudiant penné, le passé s'adressant au présent et le présent souriant au passé.

samedi 14 novembre 2020

Vue aérienne de l'ancienne Alma Mater

Cette vue aérienne, dénichée par le vieux Poil Br.m D.sm.t, est très instructive. Elle permet de situer précisément la vieille Alma Mater, installée dans l'ancien Palais Granvelle. Elle est coincée entre le boulevard de l'Impératrice (qui passe devant sa cour) et la rue des Sols (qui remonte vers l'église et - plus haut - vers le Palais des Beaux-Arts).

Cette vue n'est pas datée mais on peut estimer qu'elle a été prise entre 1926 et 1928, en raison des dates des travaux de démolitions du quartier. A gauche de l'Université, les bâtiments ont déjà été rasés. Et, à droite, l'on distingue la courbe d'une route qui entoure les jardins du Mont des Arts (avant qu'il n'accueille la Bibliothèque royale).

Les bâtiments du Palais Granvelle seront le siège principal de l'ULB de 1842 à 1928, date à laquelle le quartier disparaît définitivement pour laisser la place à la gare centrale et à la galerie Ravenstein. Le déménagement de l'Université au Solbosch est alors - pour l'essentiel - déjà fait depuis plusieurs années.

Carte postale, transmise par Br.m D.sm.t.

Détail de la vue aérienne précédente.

Carte postée en 1906.

Le Poil M.ch.l H.rm.nd nous transmet également cette carte très étonnante, postée en 1930. On y propose la façade du Palais Granvelle à la vente. Qu'est-il, en définitive, advenu de cette façade ?
 

Document transmis par M.ch.l H.rm.nd

Dans son article consacré au Granvellepaleis, Wikipedia indique que les façades de l'ancienne Université sont allées à Woluwe-Saint-Lambert afin de les utiliser pour construire la maison communale. Projet qui ne s'est finalement pas concrétisé. Des pierres dures non taillées ont servi de bordures en 1944, des pierres blanches ont été employées pour une galerie au cimetière de Stokkel et le reste a été vendu à divers particuliers...

O jerum, jerum, jerum !
O quae mutatio rerum !