mardi 6 septembre 2016

Saint-Verhaegen 1945 : les photos d'une explosion de joie

En 1939, 40 et 41 (l’ULB ferma ses portes le 25 novembre 1941), l’A.G. décida de renoncer à la fête et d’organiser des collectes au profit des familles des étudiants et anciens étudiants mobilisés. Pendant le conflit, il y eut quelques réunions d'ULBistes pour célébrer le 20 novembre mais aucune festivité d'ampleur, évidemment. L’Université rouvrit ses portes le 20 novembre 1944 : il n’y eut bien entendu pas encore de Cortège cette année‑là, une partie du territoire national étant encore occupé. Un rassemblement eut néanmoins lieu au Solbosch, devant la statue de Verhaegen, et à la colonne du Congrès.

C'est en 1945, après six ans d'absence, que le Cortège de la Saint-Verhaegen retraverse la ville de Bruxelles. C'est donc bien naturellement que Bruxelles Universitaire titre à sa Une "Enfin une VRAIE Saint-Verhaegen". La joie de la liberté retrouvée est assez justement illustrée par un "étudiant sauvage" qui jaillit d'une cage et s'élance à la poursuite de deux demoiselles : le souffle de la vie est de retour.

Nous avons reconstitué ici la plus grande série de photographies de cette explosion de joie que fut cette Saint-Verhaegen 1945. Certains clichés sont inédits.

Une du Bruxelles Universitaire du 20 novembre 1945.Ce document provient
du Service Archives, Patrimoine et Collections spéciales de l'ULB.

50 avenue Franklin Roosevelt à 1050 Bruxelles.



Le programme de cette première Saint-Vé d'après-guerre annonce des cérémonies en deux temps, le 19 et le 20 novembre. Avec, pour la première fois, un hommage collectif à Frans Kufferath, tué le 11 mai 1940 au fort d'Eben-Emael, lors d'un assaut des troupes allemandes. Kufferath est un exemple typique du Poil actif : Comitard du Cercle Polytechnique, ancien Président de l'Association générale des étudiants en 1934 et en 1939. C'est à ce titre qu'on salua sa mémoire.

Extrait du Bruxelles Universitaire du 20 novembre 1945.Ce document provient
du Service Archives, Patrimoine et Collections spéciales de l'ULB.

50 avenue Franklin Roosevelt à 1050 Bruxelles.

Pour soutenir la reprise des coutumes du 20 novembre et en souligner la continuité, Bruxelles Universitaire publie les souvenirs d'un Poil d'avant-guerre dans son numéro de la Saint-Vé 1945.



 


Extrait du Bruxelles Universitaire du 20 novembre 1945.Ce document provient
du Service Archives, Patrimoine et Collections spéciales de l'ULB.

50 avenue Franklin Roosevelt à 1050 Bruxelles.


Photos de la première Saint-Verhaegen d'après-guerre

Sur cette photo inédite du dépôt de fleurs le 20 novembre au pied du monument à Francisco Ferrer, place du Samedi (dans le centre de Bruxelles), on distingue le drapeau du Cercle de Droit et celui du Cercle Polytechnique.

Collection privée En Bordeaux et Bleu.

"La vie de Popol" par Alise Le Pays"... Avec cet auteur fictif - et ce livre improbable "en vente dans toutes les chaires de vérité" -, ce char dénonce le retour de Léopold III sur le trône. Une partie de l'opinion publique reproche notamment en effet au Roi d'avoir capitulé en mai 1940 et de s'être marié pendant sa captivité.

Ce document provient
du Service Archives, Patrimoine et Collections spéciales de l'ULB.

50 avenue Franklin Roosevelt à 1050 Bruxelles.

Le char de Pharmacie se moque également du souverain et suggère d'employer le gouvernement Vanacker (composé de socialistes, de libéraux et de communistes) pour régler la question royale : "Contre la Léopoldine, la Vanackerine. Dans toute pharmacie." Plus léger, le cercle de Pharma conseille aussi aux vénériens de courir "au pharmacien".


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du Service Archives, Patrimoine et Collections spéciales de l'ULB.

50 avenue Franklin Roosevelt à 1050 Bruxelles.


De son côté, le char du Cercle Solvay propose une machine à sauver le franc, tandis qu'une gaïsha agite un éventail frappé du nom de la Société Générale de Belgique et qu'un cagoulard néo-fasciste s'active. Le message n'est pas clair : la Générale, la plus puissante des sociétés belges, est-elle accusée de faire de l'œil aux forces réactionnaires du pays, elle que la gauche accusait déjà d'être un parangon du capitalisme ?

Collection privée En Bordeaux et Bleu.

Collection privée En Bordeaux et Bleu.

Le Cercle de Médecine et son char, tiré par des chevaux, est précédé par un trompetiste.

Collection privée En Bordeaux et Bleu.

Collection privée En Bordeaux et Bleu.

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du Service Archives, Patrimoine et Collections spéciales de l'ULB.

50 avenue Franklin Roosevelt à 1050 Bruxelles.

Sur le flanc gauche du char de Médecine, on devine le jeu de mots "Mes deux seins" et le début de slogan "Avec la pénicilline..." Et sur le flanc droit : "La pénicilline, élixir de longévité."

Derrière la charrette de brasseur, des Poils tirent une caisse à savon en forme de cercueil. A son bord, un étudiant déguisé en squelette incarne - si l'on peut dire - l'imprudent qui "n'avait pas pris de pénicilline".

Malgré son ton publicitaire ironique - "La pénicilline fait de beaux enfants. Madame ! Donnez-en à votre américain" -, un panneau affiché sur le char fait écho, en pleine guindaille, à une guerre pas si lointaine : les soldats américains sont encore présents et véhiculent - eux aussi - la vérole.

Ce document provient
du Service Archives, Patrimoine et Collections spéciales de l'ULB.

50 avenue Franklin Roosevelt à 1050 Bruxelles.

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50 avenue Franklin Roosevelt à 1050 Bruxelles.

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50 avenue Franklin Roosevelt à 1050 Bruxelles.


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50 avenue Franklin Roosevelt à 1050 Bruxelles.

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50 avenue Franklin Roosevelt à 1050 Bruxelles.

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Sous les yeux ébahis des badauds, des pandores et de deux militaires, le Cortège (ici le char de l'Association générale) passe - dans un nuage de fumée - remettre une penne au plus vieux Poil de Bruxelles : Manneken Pis.

Ce document provient
du Service Archives, Patrimoine et Collections spéciales de l'ULB.

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Les périls léopoldistes et vénériens

Les calembours anti-léopoldistes affichés ou peints sur les chars de Saint-Verhaegen ne doivent pas nous surprendre. Dès le 20 juin 1945, le Bruxelles Universitaire relaie, en page deux, les propos particulièrement violents du Cagoulard - un Frère Macchabée, donc - opposé au retour du Roi sur le trône.



Le "péril vénérien" - bien réel - et son remède - la pénicilline - sont largement évoqués dans le Cortège de Saint-Vé. Mais ils sont déjà longuement abordés un mois plus tôt dans le Bruxelles Universitaire. Ainsi, dans le numéro du 26 octobre 1945, la maladie de Vénus y est notamment comparée aux Vergeltungswaffe 1 et 2, les bombes volantes nazies, par le jeux de mots "V1, V2, V.role". Et les "Propos du Cagoulard" du  même numéro soulignent quant à eux avec humour que l'Association générale des étudiants s'engage dans une campagne prohylactique.

Au-delà du clin d'oeil à Jean Mardulyn, président de l'A.G. en 1941, nommé assistant du recteur à son retour du camp de Buchenwald, on relèvera dans cet article les coups de griffe adressés au professeur Pirenne et à ses positions léopoldistes. Le Bruxelles Universitaire consacrera plusieurs articles et entrefilets virulents au professeur.




Extrait du Bruxelles Universitaire du 26 octobre 1945.Ce document provient
du Service Archives, Patrimoine et Collections spéciales de l'ULB.

50 avenue Franklin Roosevelt à 1050 Bruxelles.