Dans ses Souvenirs d'un revuiste (1926), George Garnir (1868 - 1939) - l'auteur du Semeur - évoque la revue étudiante Eendracht maakt macht lancée en février 1888. Elle fut, dit-il, "l'Alma Genetrix de toutes les autres revues universitaires : elle fixa le type de l'étudiant littérateur, de l'étudiant en vadrouille, de l'étudiant bloqueur et de l'étudiant gosse. Elle inaugura les parodies des leçons professorales."
Au détour d'une ligne, Garnir nous dit que cette revue "en quelques actes et autant de tableaux" fut jouée par "les premières étoiles du Cercle "Les Nébuleux"", fondé en octobre 1887.
Or, quelques paragraphes plus loin, le même Garnir indique qu'il a participé à la rédaction de la revue : "Les auteurs d'Eendracht ? Ils étaient trois et même quatre, tous
Montois : Fernand Robette, Fernand Dessart et Maurice Carez ; j'y avais
aussi mis la main, mais c'est une main qui ose à peine", écrit-il.
Et de signaler également que c'est dans Eendracht qu'il fit ses débuts chorégraphiques : Gustave Dryepondt et lui furent "les deux premières danseuses mâles qui se soient fait applaudir à l'Eden de la rue de la Croix-de-Fer par un public idolâtre".
Reprenons : une pièce jouée par les Nébuleux, que Garnir a co-écrit et dans laquelle il a dansé... Cela suffit-il pour affirmer que Garnir a fait partie du fameux Cercle des Nébuleux ? Clairement, non.
Cependant le doute subsiste. Car si George Garnir ne mentionne plus jamais les Nébuleux ni dans ses Souvenirs d'un revuiste ni dans ses Souvenirs d'un journaliste, cela ne signifie pas pour autant qu'il n'en pas été membre. Garnir est en effet assez discret sur l'ensemble de son parcours universitaire. Ainsi, il ne parle pas non plus de ses études de droit. Et il n'évoque que de loin le Journal des étudiants qu'il lance en 1888 avec le futur sénateur Henri Disière. Il pourrait cependant être content de cette publication : il y a fait ses armes de journaliste et elle s'est maintenue jusqu'en 1914.
De la même manière, s'il détaille le conflit de 1890 qui oppose les étudiants et les autorités académiques après le refus d'une thèse en philosophie, Garnir ne fait que citer le comité de la Permanente (l'ancêtre de l'Association
générale des étudiants), qu'il anime à ce moment-là vigoureusement avec Louis de Brouckère,
Paul-Emile Janson et quelques autres. (George Garnir, Souvenirs d'un revuiste)
Enfin, il faut attendre 1959 et la publication posthume des Souvenirs d'un journaliste, pour trouver l'histoire du Semeur sous la plume de Garnir. Et encore, il la résume en quelques paragraphes teintés d'humour, alors qu'il aurait également pu se féliciter de la pérennité de ce chant, écrit lors du conflit de 1890.